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vendredi 28 août 2015

Méthode du cas pratique : la vérité du syllogisme (2)





L’une des premières choses que l’on a du vous apprendre, ou en tout cas vous évoquer en faculté de droit, soit au moment où l’on vous a parlé de la méthode du cas pratique, soit même avant quand on vous a parlé de la méthode juridique en général, c’est le syllogisme. Cette chose étrange, qui paraît très simple, si simple qu’on se demande pourquoi on l’explique même. Et probablement que la notion même vous est sortie de la tête aussi vite, ou qu’elle est maintenant noyée sous des caisses de conseils, trucs et astuces anecdotiques qui constituent votre méthode du cas pratique.

Alors aujourd’hui, je vais essayer de faire coup double en reprenant un peu ce qu’est le syllogisme, et comment cela doit guider votre méthode du cas pratique. J’en profiterai pour préciser l’intérêt de faire un plan dans un cas pratique.

Qu’est-ce qu’un syllogisme ?

C’est un raisonnement logique à deux propositions (une majeure et une mineure) conduisant à une conclusion qu'Aristote a été le premier à formaliser (merci Wiki).

On pourrait aller assez loin dans l’exposition du syllogisme, mais on atteindrait alors largement le point où discuter de la méthode prendrait tellement de place en soi qu’on basculerait du droit à l’étude de la logique, qui est une matière en soi.

Pour simplifier, il s’agit de faire correspondre entre elles :
  • d’une part une situation particulière (la proposition mineure)
  • d’autre part une règle générale (la proposition majeure)
  • pour en arriver à une conclusion
Il est facile de comprendre pourquoi c'est la méthode logique qui a été préférée dans le cadre de l'application du droit : elle correspond précisément à l'idée de base de la justice telle qu'on la conçoit, des faits, des règles, des solutions.

On pourrait croire qu'il s'agit de la seule méthode logique qui permet de faire du droit, mais ce serait aller trop vite, mais il me faudrait plus de temps pour en parler!

La meilleure méthode du cas pratique (vient d’un cours de maths de 4ème)

Les origines

Comme pas mal de gens qui font du droit, j’ai passé un bac S. Mais, peut être comme un peu moins de gens, j’ai toujours été plutôt bon dans les matières scientifiques, et notamment pas trop mauvais en maths. Et ça, c’est notamment grâce à ma professeure de maths de 4ème et 3ème, qui a passé beaucoup de temps à expliquer une méthode claire et précise pour la résolution des exercices. Une méthode que j’ai intégré et utilisé pour les maths jusqu’au bac, avec succès.

Quel rapport avec le droit ? Eh bien, le syllogisme déjà, qui est, sans qu’elle ne nous l’ai dit clairement, ce que ma professeure nous avait enseigné, et qui est à la base de pas mal de démonstrations, notamment en géométrie.

Dans les deux cas, il faut prendre les éléments d’un énoncé, que l’on va qualifier de façon pertinente, puis leur appliquer des règles pour en tirer des conclusions. Et parfois, récupérer ces conclusions pour recommencer une nouvelle démonstration.

La méthode Prof de Maths

Elle est assez simple à expliquer, puisqu’on peut la résumer en trois étapes :
  • On sait que (mineure)
  • Or (majeure)
  • Donc (conclusion)
Pour prendre un exemple maths niveau collège :
  • Le polygone ABCD a 4 cotés et 4 angles égaux (mineur, particulière)
  • Un polygone qui a 4 cotés égaux et 4 angles égaux est un carré (majeur, générale)
  • Le polygone ABCD est un carré (conclusion)
Ça parait tout bête dit comme ça, mais c’est une méthode prévue pour des collégiens, c’est-à-dire pour être facile à retenir, et facile à appliquer. Dans les exercices de maths, souvent il y a beaucoup de données, et plusieurs étapes jusqu’au résultat final (ça vous semble familier ?). Cette méthode permet de découper en morceau les étapes du raisonnement, sans ne rien oublier et en mettant toujours en évidence les différents éléments de la réflexion.

C’est une très bonne méthode car, en s’y tenant de façon stricte, il est impossible de passer à côté d’éléments de la démonstration. Or, comme en maths au collège/lycée, dans un cas pratique de droit on s’intéresse principalement à l’analyse, aux développements et à la réflexion.

Comment ça se transpose en Droit ?

Pour reprendre les 3 étapes de la méthode :
  • On sait que = Fait(s) qualifié(s)
  • Or = Règle(s) de droit
  • Donc = Conclusion
On n’a pas vraiment révolutionné quoi que ce soit, toujours ! Mais on a quand même réduit la méthode à 3 éléments extrêmement simples, qui partent des faits pour arriver à la conclusion.

Et c’est là qu’est le véritable enjeu du cas pratique : identifier les développements intermédiaires dont vous avez besoin pour arriver à votre réponse finale, et mettre en avant les étapes de votre raisonnement juridique (quels faits avez-vous choisis, comment les avez-vous qualifiés, quelles règles vous avez appliquée, et quelle est la solution en juridique).

Exemple :
  • La convention Z porte sur le transfert de la propriété d'un immeuble contre une somme d'argent. Il s'agit donc d'un contrat de vente immobilière. Il n'a pas fait l'objet de publicité (mineure)
  • Un contrat de vente immobilière n'est pas opposable aux tiers s'il n'a pas fait l'objet de publicité (majeure)
  • La convention Z n'est pas opposable aux tiers (conclusion)
La vraie différence avec les démonstrations mathématiques de base, c’est qu’en droit on peut discuter des règles et des qualifications, alors qu’en mathématiques elles sont de façon générales beaucoup moins discutables (ou en tout cas, on part du principe qu’elles ne sont pas discutées).

Un plan, même en cas pratique, pour séparer et structurer vos syllogismes

J’ai très vite pris le pli en fac, d’abord d’utiliser la même méthode que j’utilisais en mathématiques, parce que j’ai remarqué que ça marchait tout à fait bien, et ensuite de faire des plans pour mes cas pratiques.

C’est quelque chose qui est assez peu présenté en fac dans les cours de méthodo, enfin à mon sens, mais ça me paraît essentiel en pratique. Même si vous faites quelque chose de parfait sur le fond, si ça se présente comme un gros bloc infâme de deux pages, vous n’aurez pas le quart des points.

Alors voici mes quelques conseils :
  • Séparer vos différents blocs de questions : s’il y a un cas pratique sur un contrat, peut être nul, non-exécuté et qui peut donner lieu à indemnisation, faites 3 parties avec des titres « Sur la validité du contrat », « Sur la non-exécution du contrat » et « Sur la possibilité d’indemnisation ». Vous ça vous évitera de tout mélanger, et votre correcteur sera ravi de savoir ce qu’il est en train de lire
  • Dans chaque partie, n'hésitez pas à sous-divisez selon les étapes ou conditions juridiques. Vous faites quelque chose sur la responsabilité civile? Faites 3 sous-divisions "Faute", "Dommage" et "Causalité". Il n'est pas utile de mettre des titres à ces parties, elles sont suffisamment logiques pour être expliquées en une phrase.
  • Séparer les différentes étapes du raisonnement : les 3 étapes dont je vous ai parlé, précisément. Pas de titres pour le coup, mais sautez une ligne entre les étapes. Ça aère, et ça permet d’identifier votre réflexion clairement. Encore une fois, votre correcteur sera plus à l’aise, et surtout, pourra vous donner des points pour certains morceaux, quand bien même les autres seraient faux. Et oui, c’est un peu psychologique : quand on voit deux paragraphes séparés, on a tendance à les juger séparément. Ce qui veut dire prendre des points pour l’identification des faits même si la conclusion est fausse par exemple
  • Dans l'exposition de vos faits et leurs qualifications, ainsi que dans la discussion des règles applicables, faites un paragraphe par idée, sans sauter de ligne. Ce sera plus clair, et en dédiant le dernier paragraphe du bloc à votre "conclusion partielle", vous mettrez en évidence les éléments finaux que vous allez utiliser dans votre raisonnement final.
  • Faites des phrases simples et courtes pour les choses importantes : ne partez pas dans des phrases de 15 lignes quand vous posez les bases de votre raisonnement, elles deviendraient floues, et dans le flou, un correcteur part du principe que vous avez faux.

Un petit twist possible pour mettre du piquant

Je fais un peu de teasing dans les titres, mais c’est quelque chose de purement marginal que je vise ici. Il est possible d’exposer la majeure, la règle de droit, avant de présenter les faits. Mais c’est à doser avec précaution, parce que ça peut vite donner une impression de fouillis, quand passer des faits au droit est une forme plus naturelle.

Cela peut servir surtout quand vous devez examiner des conditions de validité, ou de responsabilité; en ce cas vous poserez d'abord les conditions légales, puis les faits qui permettent des les valider ou non.

Alexandre

1 commentaires:

  1. Ah oui???? C'est majeure mineure conclusion et pas mineure majeure conclusion (règle de droit, rapprochement des faits à la RDD puis conclusion). Votre méthodologie est erronée

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